S'abonner à la revue
Retour
juin 2012

Le marquage temporaire

Entre prix et innovations

Considéré comme mature il y a cinq ans, le marché du marquage temporaire semble de nouveau en pleine évolution. Du fait de la mise en application de la réglementation Reach, les fabricants ont accéléré leur politique d’innovation pour mettre sur le marché des produits plus respectueux de l’environnement. Un élan qui trouve encore peu d’échos auprès des utilisateurs professionnels pour qui le prix reste le principal facteur d’achat.

Dans le secteur du BTP, le marquage est une opération fréquente qui se rencontre aussi bien sur les chantiers de travaux publics que dans le second-œuvre. Il convient toutefois de différencier le marquage permanent utilisé principalement pour les travaux routiers ou lors de process industriels, du marquage temporaire objet de cet article. Notons que par le terme temporaire, nous englobons différentes familles de produits dont la durée de vie varie entre deux semaines et un an selon l’outil choisi et ses conditions d’utilisations.

Les peintures de marquage

Sur ce marché du marquage temporaire, les peintures représenteraient, selon les estimations des fabricants, environ 80% des ventes. Ces produits couvrent en effet les principales applications rencontrées dans l’univers du bâtiment (construction et rénovation), à savoir le repérage (géomètres, terrassement, assainissement d’eau), le traçage et l’indication de cotes. Bien qu’il existe des cannes d’applications (métal ou plastique) préconisées pour réaliser du pré-marquage ou marquer des points, les peintures s’appliquent le plus souvent à la main. Notons toutefois que les fabricants et fournisseurs de peintures de marquage temporaire intègrent généralement à leur catalogue les cannes qui évitent à l’opérateur de se baisser, via un système de pression situé au niveau du manche.

Au sein de la distribution, c’est-à-dire aussi bien les négoces de matériaux que les loueurs et les négoces spécialistes des TP, les peintures de marquage temporaire se différencient par leur colorimétrie, leur durée de vie et, bien entendu par leur formulation, nous y reviendrons. Concernant le premier critère, les principales ventes s’effectuent sur les couleurs fluorescentes qui présentent l’avantage d’être particulièrement visibles en extérieur et donc faciles à repérer, même à grande distance. Avec une part des estimées à 30%, la peinture rouge fluo fait office de standard, le cœur du marché comprenant également le orange (20%), le bleu, le vert, le jaune et, dans une moindre mesure le violet et le fuchsia. Contrairement à d’autres pays européens, comme en Scandinavie, les couleurs non fluorescentes (blanc, jaune, noir) sont plus rarement utilisées, en intérieur par exemple où le noir est facilement repérable sur des murs en béton brut. Généralement, ces couleurs (fluo et non fluo) ont une durée de vie allant de trois à six mois, les produits positionnés sur le haut de gamme pouvant rester visibles neuf voire douze mois après leur application.

Les poudres, craies…

Pour réaliser du marquage « très » temporaire (entre huit et quinze jours), les professionnels du BTP peuvent se tourner vers d’autres familles de produits placées, compte tenu de la domination des peintures, sur des marchés de niche.

Principalement préconisées pour du traçage, les poudres sont ainsi régulièrement utilisées par les maçons, les couvreurs, les plombiers, les électriciens, les peintres… Commercialisées dans des flacons (aussi appelés biberons) dont la contenance varie de 28 g à 4 kg, elles s’emploient uniquement à l’aide d’un cordeau traceur qui permet de réaliser, selon le diamètre du cordeau, des traits plus ou moins fins, nets et, contrairement aux peintures, très rapidement. Il suffit en effet de claquer le cordeau sur le mur ou le sol pour tracer d’un seul coup et sur une grande longueur. En termes de couleurs, les poudres rouges et bleues représentent le cœur des ventes. Le nuancier s’étend toutefois au jaune, au blanc et au noir, diversité qui permet aux différents intervenants du chantier de personnaliser leurs marques pour mieux les identifier. A l’instar du marché américain, les couleurs fluorescentes se démocratisent de plus en plus, les poudres en vert et orange fluo affichant depuis environ cinq ans des ventes croissantes, tout comme le rose fluo qui vient de faire une entrée remarquée chez les distributeurs.

Les opérations de traçage peuvent également être réalisées avec des craies ou des stylos de marquage non-permanents, des outils idéaux pour effectuer, par exemple, des traits de coupe ou un repérage très limité dans le temps. Pour l’anecdote, certains distributeurs réalisent des ventes ponctuelles de craies auprès des brocanteurs qui les utilisent pour marquer l’emplacement de leur stand. Citons également le traditionnel crayon de charpentier qui du fait de sa forme (ovale et non pas ronde) doit être taillé avec un taille-crayon spécifique.

Des peintures plus respectueuses de l’environnement

En 2008, lors de notre dernier article sur le marché du marquage temporaire, nous évoquions la mise en place récente de la réglementation Reach qui devait à plus ou moins court terme, bouleverser le marché des peintures. Quatre ans se sont écoulés et force est de constatée que les ventes sont toujours dominées par les références à base solvantée. Toutefois, l’application de Reach a contribué à assainir le marché en excluant les produits contenant des matières premières non-déclarées, sous-entendues cancérigènes et classées dangereuses comme le xylène, le chlorure de méthylène, le méthanol ou encore le glycol. Désormais, les fabricants sont en effet tenus d’utiliser des solvants non-nocifs, comme l’acétate de n-butyle, qui, malgré un temps de séchage plus long, s’est, depuis quatre ans largement répandu dans la formulation des produits.

Apparues, il y a un peu plus de deux ans, les peintures de marquage à base d’eau connaissent des ventes en progression régulière. Plus respectueuses de l’environnement, elles ont un impact négatif limité même si elles ne sont pas écologiques en soit. En effet, la teneur en eau n’excède pas 25% de leur composition (le plus souvent entre 15 et 20%), le reste demeurant des COV indispensables pour propulser le produit. Au-dessus de ce « quart aqueux », les peintures ne tiendraient pas au sol et ne résisteraient pas aux intempéries. Néanmoins, le taux de COV étant moindre, la santé de l’utilisateur est mieux préservée et le confort d’application optimisé du fait de l’absence d’odeur.

Les cordeaux, principal axe d’innovation

Le marché des poudres est quant à lui déjà bien ancré dans le respect de l’environnement avec l’apparition, il y a cinq ans, de produits à base d’oxydes naturels sans traces de plomb ni soufre et avec des pigments de coloration non polluants. De ce fait, pour ces produits, les principales avancées techniques concernent principalement les cordeaux qui ont subi plusieurs améliorations. Au cours de ces dernières années, les fabricants n’ont cessé de lancer de nouvelles références axées sur une meilleure utilisation de l’accessoire et sur les économies de poudre. Citons par exemple, l’arrivée sur le marché de traceurs double à enroulement qui permettent de limiter les déplacements et, dans le cas d’opérations en hauteur (charpentier, couvreur) d’accroître la sécurité ; de versions délivrant jusqu’à 50 mètres de cordes pour tracer sur des surfaces irrégulières (fondations, parkings…) ; de modèles avec rembobinage ultra-rapide ; avec recharge de poudre intégrée ; avec cordeau en polymère plus résistant que le traditionnel fil coton… ou encore d’appareil multifonction car jumelé avec un lasermètre. Concernant les conditionnements, certains fabricants proposent aujourd’hui des flacons à bouchon refermable qui protègent la poudre de l’humidité évitant ainsi tout phénomène de colmatage et donc la perte de produits. Cela limite également le gaspillage lié à la volonté de l’utilisateur de bourrer le cordeau de toute la poudre contenue dans le biberon, habitude qui est la principale cause de blocage du mécanisme de rembobinage.

Le prix, un frein de développement

Malgré toutes ces évolutions, le marché du marquage temporaire n’a semble-t-il pas subi de réelles révolutions. Certes, l’arrivée de la réglementation Reach a permis de protéger le marché des importations asiatiques qui, dans le courant des années 1980, avaient contribué à fortement diminuer les prix de vente. Toutefois, aujourd’hui, bien que le marché regroupe principalement des fournisseurs européens, il n’en demeure pas moins toujours fortement bataillé. En effet, comme pour d’autres consommables, le facteur prix prime largement sur la valeur technique des produits, ces derniers n’offrant d’ailleurs pas de marges intéressantes aux distributeurs. De plus, leurs ventes restent étroitement liées à l’activité des TP et à celle de la construction et sont donc dépendantes des conditions météorologiques.

Aujourd’hui, les fabricants, c’est-à-dire les formulateurs-conditionneurs, doivent donc développer des produits de plus en plus innovants malgré des coûts de matières premières (gaz, acier…) qui s’envolent. De ce fait, l’innovation reste fortement dépendante des coûts de fabrication mais aussi des prix de vente auprès des utilisateurs, ces derniers, comme nous l’avons vu, ne souhaitant pas mettre le prix pour ces produits… la percée des peintures à base d’eau, plus chères que les références standard, tendra t-elle à prouver le contraire d’ici quelques années !

ND