Les harnais antichute
La protection sans la contrainte
Constitutif d’un système de protection individuelle contre les chutes de hauteur, le harnais antichute se décline sur des niveaux de confort et de technicité variés pour répondre à de nombreuses applications dans les secteurs du bâtiment, de la maintenance industrielle et des services. Mettant en lice des intervenants nombreux, le marché connaît une certaine stagnation due au manque de dynamisme des secteurs du bâtiment et de l’industrie conjugué à la domination dans notre pays des systèmes de protection collective mis en place dans une démarche généralisée de prévention du risque de chute.
Le harnais entrant dans la composition d’un système antichute individuel assure la préhension du corps de manière appropriée pour retenir la personne pendant et après une chute, sans lui occasionner de lésion. Cet Epi relevant de la classe 3 concernant les équipements protégeant de risques mortels est composé au minimum de sangles (en polyamide et/ou polyester) réglables par des boucles enserrant le torse et les cuisses, d’une attache dorsale qui le relie au système de liaison et d’une sangle transversale au niveau du sternum qui supprime tout risque de sortir du harnais. Tout autre type de harnais, baudriers ou autres ceintures de travail ne répondant pas à ces exigences minimum qui sont celles de l’EN 361 ne peut faire partie d’un dispositif antichute.
Arrêter la chute
Conformes à la seule norme EN 361, les harnais antichute les plus simples sont conçus dans l’objectif quasi-unique de retenir l’utilisateur en cas de chute et de le maintenir dans une position correcte qui n’occasionnera pas de lésions corporelles. Essentiellement destinés à des utilisations occasionnelles par des professionnels du bâtiment et de la maintenance industrielle qui ne sont pas des spécialistes du travail en hauteur, ces harnais ne sont pas adaptés aux travaux en maintien et, a fortiori, aux travaux sur corde, même si différents niveaux de confort et de facilité d’utilisation (et donc, de prix) existent au sein de cette catégorie que certains fournisseurs segmentent en deux sous-divisions, les harnais à un point d’ancrage antichute (obligatoirement dorsal) et ceux à deux points d’ancrage (dorsal + sternal), lesquels offrent une plus grande polyvalence. Pour évoquer les applications liées au type d’ancrage antichute, on peut indiquer que l’attache dorsale (généralement, un D en acier) est plus appropriée aux mouvements du corps vers l’avant, l’ancrage antichute sternal (D en acier ou ganses textiles réunies par un anneau) étant quant à lui plus adapté à la progression verticale, le long d’une échelle par exemple. Concernant les attaches antichute d’un harnais, on précisera qu’elles sont dans tous les cas sur la partie supérieure du corps (au dessus du niveau du sternum) celui-ci ne devant pas, en cas de chute, faire un angle supérieur à 50° par rapport à la verticalité du plan.
Le maintien au poste de travail
Offrant une polyvalence supérieure, les harnais de maintien au travail sont adaptés à la plupart des situations de travail en hauteur tout en assurant un confort optimal à l’utilisateur. Présentant toutes les caractéristiques des harnais EN 361, ces epi sont en outre équipés d’un système de maintien au travail conforme aux exigences de la norme EN 358 qui prend la forme d’une ceinture et de deux points d’accroche latéraux, en aucun cas destinés à arrêter une chute mais permettant à l’utilisateur de se maintenir à l’endroit de l’intervention en position quasi-assise, avec un assez bon confort et en conservant les deux mains libres. Utilisés dans des métiers différents comme le montage de charpentes métalliques ou la maintenance de lignes électriques ou d’éoliennes, les harnais de maintien au travail forment une catégorie de produit qui s’étoffe régulièrement dans l’objectif de faire correspondre à chaque métier un harnais présentant des caractéristiques spécifiques.
Travailler en suspension
Le plus technique de la gamme, le harnais de suspension, répond à plusieurs problématiques, le travail en hauteur, l’accès sur corde et le travail en suspension. Ces harnais sont adaptés à des tâches très spécialisées (travaux acrobatiques ou en espace confiné, sauvetage et évacuation, élagage…) pratiqués par des utilisateurs chevronnés capables de travailler en suspension, sans appui des pieds ni des mains. Répondant aux exigences des deux normes applicables aux catégories de produits précédemment évoqués, ces harnais sont également conformes à la norme EN 813 et comportent, outre les points d’ancrage antichute dorsal et/ou sternal, un point d’attache antichute ombilical adapté au déplacement sur corde (il permet la connexion à un descendeur) et qui fait naturellement basculer le corps en position assise, laquelle est encore facilitée par la présence éventuelle d’une sellette augmentant le confort de l’utilisateur lors du travail en suspension.
Le port du harnais facilité
S’inscrivant dans une démarche de prévention du risque, le port du harnais, comme celui de la plupart des EPI, est souvent synonyme de perte de temps et d’entrave physique pour les utilisateurs. C’est pourquoi les services R&D des fabricants travaillent à la conception de produits d’une utilisation sans cesse simplifiée et d’un confort croissant, et ce sur l’ensemble des segments de la gamme. Du côté de la simplification de la mise en place du produit, on peut citer la différenciation des couleurs des sangles des épaules et des cuisses pour enfiler plus rapidement le harnais, l’existence de boucles automatiques qui dans certains cas conservent leur réglage et surtout l’émergence d’une catégorie de harnais intégrant un vêtement (gilet, veste, blouson, combinaison). Dans ce dernier cas, Il suffit d’enfiler le vêtement et de régler les sangles cuissardes. Côté confort, on peut noter les avancées réalisées en matière de réduction du poids, certains modèles disponibles sur le marché pesant à peine un kilo. Pour mieux accompagner les mouvements de l’utilisateur, les harnais peuvent être équipés de sangles élastiques (il existe même des sangles à mémoire de forme qui épousent parfaitement le corps) et de boucles d’articulation au niveau des hanches. Pour permettre les déplacements latéraux ou vers l’arrière en toute liberté, les ceintures de certains harnais de maintien au travail sont rotatives.
Déplacement progressif du cœur du marché
En l’absence de chiffres fiables concernant les ventes de harnais, il nous est difficile d’indiquer avec certitude le type de harnais antichute générant le volume de vente le plus élevé sur le marché français, d’autant que les réponses données par les fournisseurs quant à leurs meilleures ventes varient en fonction du positionnement des différentes marques et de l’étendue de leurs offres respectives. Toutefois, il semblerait que les achats les plus nombreux portent sur les harnais d’entrée de gamme. En dépit d’une attente réelle de la part d’un grand nombre d’utilisateurs portant sur le confort et le caractère pratique des harnais, la recherche d’un produit certifié au meilleur prix (concernant le prix des harnais, la fourchette est extrêmement large et débute sous la barre des 20 e, prix revendeur, pour atteindre jusqu’à 20 fois cette valeur pour les modèles les plus sophistiqués répondant à des environnements de travail tout à fait spécifiques) est plus que jamais d’actualité en cette période difficile dans le bâtiment comme dans l’industrie.
Ce qui n’empêche pas le marché, aux dires de plusieurs fournisseurs importants, d’évoluer de manière assez sensible depuis plusieurs années vers le milieu de gamme, les ventes de harnais EN 361 équipés de deux points d’ancrage antichute ainsi que celles de harnais de maintien au travail grignotant des parts de marché régulièrement. Les premiers seraient choisis notamment pour la polyvalence d’applications qu’apporte leur double ancrage antichute et les seconds, pour répondre aux besoins éprouvés dans des métiers qui montent en puissance telle la maintenance d’éoliennes.
Selon certaines estimations, les harnais EN 361 à double attache antichute représenteraient la catégorie la plus vendue avec un tiers du volume du marché, suivis des harnais à un ancrage antichute unique puis des modèles de maintien au travail et enfin des harnais pour le travail en suspension. Cette ventilation du volume du marché des harnais semble logique mais rien ne nous permet malheureusement d’affirmer qu’elle correspond à la réalité. Sans toujours pouvoir avancer aucun chiffre, nous terminerons ce chapitre en évoquant une tendance forte pointée par la plupart des fournisseurs, à savoir la vente répandue de kits antichute comprenant harnais, système de liaison et connecteurs, des produits qui répondent à l’attente de nombreux professionnels réalisant des travaux en hauteur de manière occasionnelle.
La montée progressive des ventes de harnais conçus pour des métiers et/ou des environnements très spécifiques (produits antifeu en kevlar, par exemple, ou harnais Atex pour les environnements explosibles), même si elles restent modestes, est une tendance également relevée. On peut signaler à cet égard que l’offre en kits concerne le plus souvent des fournisseurs plutôt généralistes (l’un d’entre eux nous a indiqué réaliser la moitié de son chiffres d’affaires en harnais antichute avec de tels produits), celle en harnais sophistiqués dédiés à des applications spécifiques étant de manière logique développée par des spécialistes des EPI, voire des monospécialistes des systèmes antichute.
Faible évolution du CA
Représentant une valeur estimée par plusieurs fournisseurs autour de quarante millions d’euros (prix public), dont 20 à 40% seraient générés par les ventes de harnais (les avis diffèrent sensiblement sur ce point), le marché de l’antichute individuel est en relative stagnation depuis quatre à cinq ans après avoir régulièrement progressé jusqu’à la crise de 2008.
Ce marché très concurrentiel est actuellement très tendu et aurait connu un assez net repli au cours des premiers mois de l’année. La majeure partie du chiffre d’affaires de cette famille d’EPI est réalisée par des ventes faites par la distribution professionnelle généraliste ou spécialiste ou par les fabricants eux-mêmes aux industries, et plus précisément aux sous-traitants réalisant la maintenance des sites.
Moins mature quant à l’utilisation des EPI en général et des systèmes antichute en particulier, le secteur du bâtiment représente toujours un potentiel de ventes non négligeable, même si le comportement des artisans change petit à petit. Se prémunir d’éventuels accidents est une notion mieux intégrée par la jeune génération et l’on peut s’attendre, ou du moins espérer, que le secteur du bâtiment comble assez vite son retard en ce domaine.
Les autres composantes d’un système antichute
Le harnais est l’une des trois composantes d’un système antichute individuel qui comprend également un point d’ancrage et un système de liaison. Le point ancrage se caractérise principalement par sa résistance, la norme exigeant qu’il résiste à plus de 10 kN pendant au moins 3 minutes et par le fait qu’il doive être attaché sur un support dont la résistance est elle aussi garantie. Le système de liaison remplit quant à lui une double fonction : relier l’utilisateur (via le harnais) au point ancrage pour limiter son déplacement et retenir celui-ci en cas de chute. La plupart des produits de liaison existants sont équipés d’un système de dissipation d’énergie qui permet d’amortir l’impact d’une chute sur le corps pour qu’il ne dépasse pas 6 kN, une valeur au-delà de laquelle des lésions pourraient se produire.
Un cadre réglementaire strict
L’utilisation des EPI contre les chutes de hauteur est régie par la directive européenne 89/656 relative à l’utilisation des EPI ainsi que par le décret n° 2004-924 du 1er septembre 2004 relatif à l’utilisation des équipements de travail pour des travaux temporaires en hauteur, sans limite inférieure de hauteur. Comme tout EPI, les systèmes antichute doivent être fournis gratuitement par l’employeur à ses salariés. Avant d’énumérer quelques points importants inclus dans cette réglementation, on précisera que l’utilisation des EPI contre les chutes de hauteur doit intervenir uniquement dans le cas où un système de protection collective n’existe pas sur le lieu de l’intervention ou ne peut y être installé de manière temporaire.
- Les travailleurs doivent recevoir une formation adéquate et spécifique aux opérations envisagées et aux procédures de sauvetage ;
- L’employeur doit préciser dans une notice les points d’ancrage prévus pour la mise en œuvre de l’équipement de protection individuelle ainsi que les modalités de son utilisation ;
- Lorsqu’il est fait usage d’un équipement de protection individuelle contre les chutes de hauteur, un travailleur ne doit jamais rester seul afin de pouvoir être secouru dans un temps compatible avec la préservation de sa santé ;
- Les systèmes de protection individuelle contre les chutes de hauteur doivent faire l’objet de vérifications générales périodiques (au moins une fois par an) par des personnes qualifiées, le résultat de ces vérifications devant être consigné sur le registre de sécurité ouvert par le chef d’établissement.