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novembre 2019

Les nettoyants et les dégraissants

Vers le risque zéro

Bien que les ventes de consommables de maintenance à base de solvants pétroliers soient encore importantes, leur cannibalisation croissante par les ventes de produits de générations plus récentes, plus respectueux de la santé humaine et de l’environnement, est désormais une réalité sur tous les segments de marché, dont celui du nettoyage et du dégraissage.  

Développés et fabriqués par des spécialistes à la recherche permanente du meilleur compromis entre sécurité, efficacité et plus grand respect de l’environnement, les consommables de maintenance écoresponsables dont ceux qui sont dédiés au dégraissage et au nettoyage représentent de l’avis unanime le marché de demain. 

Un marché dont l’orientation est très prometteuse pour la distribution spécialiste de la FI et de la quincaillerie qui possède tous les atouts pour y tenir une place plus importante que celle qu’elle occupe aujourd’hui.

Souvent vécues comme contraignantes, les opérations de dégraissage et/ou de nettoyage font rarement l’objet d’une grande préoccupation au sein des entreprises. Elles permettent pourtant d’évoluer dans un environnement professionnel valorisant et, dans certaines applications, participent même de la qualité d’un process de fabrication », indique Vincent Babok, chef de produit Nettoyage et Protection anticorrosion chez Fuchs Lubrifiant, pour qui  « Il s’agit donc d’un véritable enjeu pour les industriels ». Thierry Mongrelet, directeur commercial et marketing de CRC Industries, souligne quant à lui que les consommables pour le nettoyage et le dégraissage, souvent mésestimés, forment « une famille de produits plus complexes que les lubrifiants, notamment quant à leur mise en œuvre qui nécessite parfois le recours à des machines spécifiques comme les fontaines de dégraissage ». 

Nombreuses dans le domaine de la maintenance industrielle, les applications des consommables pour le dégraissage et/ou le nettoyage, commercialisés sous divers conditionnements (aérosols, vaporisateurs et bidons et, pour la vente en vrac fûts, cuves, containers et camions citernes de plusieurs dizaines de mètres cubes), peuvent être classées en plusieurs catégories. 

Certaines interviennent au cœur même du process de fabrication. Il s’agit d’ôter la graisse de toutes sortes de pièces, souvent entre deux opérations de fabrication et généralement via une installation comme un tunnel de lavage. D’autres concernent l’environnement du process de production, prenant place au sein même de l’usine de fabrication (nettoyage d’un convoyeur, d’un moule ou d’un carter de machine…) ou chez un sous-traitant, frigoriste ou hydraulicien par exemple. 

Une troisième catégorie d’applications relève de la maintenance qui peut être qualifiée de « généraliste ».  Elle concerne le nettoyage de toutes sortes de supports sans aller toutefois jusqu’à celui du sol et des murs qui requiert l’utilisation d’un détergent plutôt que d’un nettoyant, deux types de produits légèrement différents, notamment quant à leur composition et leur concentration en substance active. On pourrait encore allonger encore cette liste d’applications relevant plus du dépoussiérage de certains supports (par exemple pour éviter l’oxydation de contacts) que du nettoyage, existant dans certains métiers comme la maintenance informatique ou l’électricité.

Dégraisser n’est pas nettoyer

Le dégraissage et le nettoyage sont deux opérations distinctes, même si certains consommables s’acquittent des deux. Comme son nom l’indique, un dégraissant a pour objet d’ôter la graisse de supports différents, sans pour autant les débarrasser de toute salissure. Les nettoyants sont quant à eux destinés à faire disparaître de tous types de supports des salissures et polluants divers dont des résines, adhésifs de contact, colles et autres produits qui ne se solubilisent pas comme les graisses. Pour cette raison, les nettoyants sont composés de solvants spécifiques. 

Et puisque l’on cite pour la première fois dans cet article le terme de « solvant », on en profitera pour rappeler ici que les solvants sont des produits d’origines diverses, y compris végétale, qu’ils ne sont pas toujours issus du pétrole et que nombre d’entre eux ne sont ni toxiques, ni même nocifs. Cette parenthèse refermée et pour en revenir aux nettoyants, on peut évoquer l’amalgame souvent fait avec les détergents, deux catégories de consommables proches mais qui diffèrent légèrement, comme on l'a déjà dit, notamment quant à leur concentration en produit actif, plus élevée pour les nettoyants. 

Les consommables utilisés dans les principales applications relevant de la maintenance industrielle mais aussi utilisés pour certains d’entre eux dans l’univers du bâtiment, sont élaborés à partir d’un nombre important de composés. 

Les paragraphes suivants classent ces matières premières mises en œuvre, selon les cas, par application à chaud ou à froid, manuellement ou automatiquement, par trempage ou pulvérisation, et en donnent les caractéristiques principales. 

Les solvants halogénés, efficaces mais dangereux 

Les solvants organiques halogénés, des hydrocarbures contenant des halogènes, principalement du chlore, du fluor, du brome et de l’iode, utilisables à froid ou à chaud (au trempé), sont d’excellents nettoyants pour les huiles minérales et végétales mais sont, en revanche, incompatibles avec la plupart des matériaux organiques (y compris certains thermodurcissables). Ils sèchent rapidement et sont ininflammables. 

Le revers de la médaille tient au danger qu’ils représentent pour la santé humaine (ils peuvent avoir un impact sur le système nerveux et sur certains organes), jusqu’à être cancérogènes ou mutagènes pour certains solvants chlorés, ainsi que pour l’avenir de la planète. « Depuis quelques années, le rôle de ces solvants dans la destruction de la couche d’ozone a été démontré, ce qui a conduit à l’interdiction de certains d’entre eux dont le trichloroéthane (T111) et le trifluoroéthane (CFC113) », rappelle Jacques Tardif, dirigeant du groupe Tec Industries. Malgré ces caractéristiques, les solvants halogénés, et notamment les chlorés et les fluorés, sont encore très utilisés sur le marché pour leur grande efficacité. 

Solvants hydrocarbonés et solvants oxygénés 

Contrairement aux solvants halogénés, les non halogénés agissent par dissolution des graisses et sont des produits très inflammables. Sur cette dernière caractéristique, on peut indiquer que selon le règlement CLP (Classification, Labelling and Packaging), un produit est dit inflammable si son point éclair – soit la température minimum à laquelle il émet suffisamment de vapeurs pour former, avec l’air ambiant, un mélange inflammable au contact d’une flamme ou d’une étincelle – est inférieur à 60°C (concrètement, plus le point éclair d’un produit est bas, plus le risque que ce dernier s’enflamme est élevé).   

Cette vaste catégorie comprend des solvants hydrocarbonés (aromatiques et non aromatiques) et des solvants oxygénés parmi lesquels les cétones, alcools et éthers. Comme les solvants halogénés, ils présentent des risques pour la santé dans le cas d’une exposition prolongée et un haut degré d’inflammabilité. 

Progressivement abandonnés pour cette dernière raison, ces produits compatibles avec la plupart des supports communs dans l’industrie (à l’exception notamment du zinc, du cadmium, du plomb et de leurs alliages), caoutchoucs et plastiques compris, ont récemment bénéficié d’un certain regain d’intérêt. Ils sont couramment utilisés pour le nettoyage (à froid ou à chaud, en machine) d’huiles, de cires ou de graisses, souvent en association avec d’autres solvants, notamment chlorés. Classés COV pour certains d’entre eux (c’est le cas des alcools), ces solvants non halogénés dont l’utilisation requiert des précautions particulières sont néanmoins toujours en usage dans de nombreuses applications grâce à leur bon pouvoir solvant. 

Solvants d’origine végétale 

D’autres solvants non halogénés, difficilement classables dans les catégories déjà citées, entrent encore dans la composition des dégraissants et/ou nettoyants. C’est le cas des terpènes et esters d’origine végétale, qui ne présentent pas de caractère particulier de dangerosité, même s’ils peuvent être irritants ou entêtants. Excellents solvants pour les graisses lourdes, les salissures huileuses et les huiles carbonisées, les terpènes sont de plus en plus répandus parmi les agents dégraissants et notamment le d-limonène, un extrait de pelures d’agrumes très couramment utilisé aujourd’hui. Ces agents qui ont eux aussi un bon pouvoir solvant peuvent être utilisés en immersion, par aspersion, ou encore par essuyage et présentent l’avantage d’être adaptés à tous les métaux. 

Des produits élaborés sur base aqueuse 

Pour dégraisser et nettoyer, on peut aussi utiliser des solutions aqueuses (lessivielles). Utilisés dans des procédés d’immersion ou d’aspersion, ces produits dont les formulations sont le plus souvent adaptées à des applications spécifiques sont des mélanges complexes contenant notamment des phosphates, des silicates, des hydroxydes et des tensio-actifs en solution dans l’eau.  

Ils peuvent être classés en fonction de leur pH (le potentiel Hydrogène), l’unité de mesure de l’acidité (l’échelle couverte va de 1 à 14).

Une solution dont le pH est supérieur à 10, fortement alcaline, réalise un dégraissage par saponification, la salissure se transformant en savon par un processus chimique. Incompatible avec les métaux légers, ces solutions offrent une très faible protection anticorrosion. A l’inverse, les solutions faiblement alcalines, avec un pH entre 9 et 10, offrent une forte protection corrosive et les tensio-actifs qu’elles renferment, des additifs à l’effet mouillant élevé qui permet au liquide de s’insinuer dans les moindres recoins d’une pièce, permettent un dégraissage réalisé sans transformation chimique de la salissure. Les solutions lessivielles dites neutre qui ont des niveaux de pH inférieurs, de l’ordre de 6 à 9,  sont utilisées dans le traitement des métaux non oxydables, résines et polymères. Ils ne confèrent aucune protection anti-corrosion.  

Un choix contraint par de nombreux paramètres 

Dans le domaine du dégraissage et du nettoyage, le choix du produit est en grande partie dicté par de nombreuses contraintes d’ordre technique et  réglementaire, sachant qu’il devra quoi qu’il en soit posséder des caractéristiques de solubilité proches de celles de la salissure que l’on cherche à éliminer. 

La nature du matériau du support à traiter guide elle aussi le choix de manière impérative et peut exclure d’office les produits comprenant certains composés. Le mode de mise en œuvre du consommable, qui peut requérir des installations particulières, est un autre paramètre à prendre en compte. Comme c’est le cas pour tout produit technique, il faut également avoir en tête que certaines caractéristiques recherchées dans un même consommable peuvent être antinomiques telles évaporation rapide et ininflammabilité ou séchage rapide et performance très élevée. Le conditionnement lui-même joue un rôle : une solution sur base aqueuse ne fera pas bon ménage avec le métal d'un aérosol, de même que certains solvants avec le plastique d'un bidon. 

Voilà pour certaines contraintes techniques, mais il existe également des impératifs dictés par des réglementations interdisant ou limitant l’utilisation de tel ou tel composé dans certaines applications. Le cas le plus emblématique concerne la certification obligatoire des produits utilisés dans les industries agro-alimentaires, issue de règlements différents selon l’application (utilisation du produit dans la chaîne de production ou dans son environnement). Dans certaines industries comme l’aéronautique, des opérations de dégraissage ou de nettoyage doivent respecter des procédures fixées et subir avec succès des tests normalisés, les critères à observer relevant alors à la fois du cadre réglementaire et des contraintes techniques. 

La santé et la sécurité au cœur des attentes 

Une fois l’ensemble des contraintes prises en compte, lesquelles sont plus nombreuses que celles que nous avons citées, le choix du produit pourra alors s’exercer. Et sur ce point, les fabricants que nous avons interrogés citent de façon quasi-unanime comme premiers critères de choix, la sécurité et la protection de la santé humaine. 

Une attente qui peut être satisfaite à travers des choix préconisés par différents instituts et notamment l’INRS (Institut National de Recherche et de Sécurité) et l’IFRAM  (Institut de Formation et de Recherche pour les Artisanat des Métaux), concernant plus particulièrement les dégraissants, et que résume la fin de ce chapitre. 

A chaque fois que c’est possible, les solutions aqueuses seront choisies, en privilégiant les produits les moins agressifs (compositions neutres ou faiblement alcalines), ainsi que les températures de traitement les plus basses possibles. Si les solutions aqueuses ne sont pas applicables, le choix s’orientera alors en priorité sur les solvants inflammables, à condition que les risques d’incendie et d’explosion soient parfaitement maîtrisés grâce à une installation et des équipements adaptés. Dans ce cas, le solvant présentant un point éclair le plus élevé possible (supérieur à 55°C) et dont la valeur limite d’exposition (VLE) est la plus élevée possible sera choisi. On pourra aussi opter pour les solvants halogénés non étiquetés comme toxiques, à condition...

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