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mars 2013

Les perceuses sur socle magnétique

La carotte plutôt que le foret

Stimulé par l’innovation produit et l’attractivité des prix, le marché des perceuses à base magnétique affiche à peine les stigmates d’un marché mature. D’ailleurs, de nouveaux entrants en font un territoire de conquête en valorisant une offre de qualité européenne.

avec quelque 7 000 pièces, commercialisées, pour l’essentiel par la fourniture industrielle, le marché des perceuses à socle magnétique est estimé par ses fournisseurs à environ cinq millions d’euros HT à la vente. Une niche à forte valeur ajoutée pour certains où les acteurs assurent que le marché, bien que mature, est loin d’être sclérosé. Son moteur : l’innovation. Sa dynamique : des prix bataillés. Sa figure de référence : l’industriel allemand Fein.

Véritables fabricants européens, revendeurs exclusifs ou importateurs de produits asiatiques, la diversité des intervenants est grande et fait le bonheur de la distribution qui est en mesure de proposer aujourd’hui une offre large et profonde constituée de machines de marques comme de produits d’appel. « Confronté pendant plusieurs années à un fournisseur en situation de quasi-monopole, les distributeurs ont souhaité faire évoluer leur mix produit/prix », souligne David Petitprez, directeur marketing-vente de Sidamo. « Ils ont favorisé de nouveaux entrants sur ce marché qui proposent aujourd’hui des machines d’un coût plus économique ».

Offre large et profonde

Entre les unités de perçage magnétiques premium de Fein ou d’autres fabricants reconnus, tel BDS Maschinen, Metabo… et les matériels no-name logotypés originaires de Taïwan, le milieu de gamme trouve, depuis quelques années, un véritable terrain d’expression en misant sur le bon rapport-qualité prix, pour cibler tout à la fois une clientèle qui n’a pas les moyens ou le besoin de s’offrir le haut du panier et des utilisateurs déçus par des produits à trop bas prix.

En effet, en matière de perceuse – on dit aussi carotteuse – à socle magnétique, les professionnels sont exigeants. Plus de 60% d’entre eux sont des charpentiers métalliques qui interviennent en hauteur, directement sur le chantier, d’autres sont poseurs de bardage ou d’équipements de levage, d’autres encore sont des spécialistes de la maintenance, des personnels du secteur automobile ou de la chaudronnerie. Tous ont un haut niveau d’exigence élevé quant à la fiabilité des machines qu’ils utilisent et à la nécessaire précision de celles ci. « Certaines applications demandent des capacités de perçage très importantes en termes de diamètre et de profondeur », explique Laurent Schwarz, directeur général de Fein France, « c’est la raison pour laquelle, depuis une quinzaine d’années, nous avons mis sur le marché ce que nous appelons, nous, des unités de perçage magnétiques qui permettent de travailler dans des conditions de sécurité, de confort et de performance plus importantes qu’avec une simple machine portative, jusqu’à des diamètres de perçage 100 millimètres et dans des épaisseurs d’acier de 50 millimètres ».

Fraise ou foret

De fait, les perceuses à socle magnétique, dont le fonctionnement ressemble à celui des perceuses à colonne (voir BBI n°101), disposent dans leur base d’un électro-aimant qui s’active dès lors que la machine est alimentée par un courant électrique. A partir de cet instant, la machine est solidaire de la pièce de métal qu’elle va trouer au moyen de fraises de carottage ou de forets emmanchés dans le mandrin. « Par carottage, on peut faire des trous importants avec des puissances réduites, puisqu’on n’enlève pas toute la matière », souligne Pierre Boretti, directeur commercial chez Ruko. « C’est tout l’intérêt de ces perceuses. A diamètre comparable, si on utilisait des forets, il faudrait des moteurs bien plus importants, donc des machines plus lourdes. Or les charpentiers métalliques opèrent généralement à plusieurs mètres du sol ». Attention toutefois aux abus de langage : bien que soit utilisé le terme de fraise à carotter, une perceuse à socle magnétique ne réalise aucune opération de fraisage à proprement parler.

Capacité de perçage

C’est le diamètre de cette fraise à carotter, plus encore que la puissance du moteur de la machine, qui va permettre une segmentation du marché. Ainsi, le cœur de gamme des perceuses à socle magnétique est constitué par des petites machines vendues entre 350 et 700 euros HT chez les distributeurs, dont les spécificités techniques vont permettre de réaliser de manière optimum un perçage d’un diamètre de 32 ou 35, voire 40 millimètres, en fonction des machines proposées par les fabricants. Qui peut le plus, peut le moins, et le mandrin de la machine sera donc en mesure d’accepter des fraises à carotter de diamètres plus faibles, des forets, des tarauds, voir des fraises à ébavurer pour travailler l’acier le plus standard et l’inox le plus délicat. « On différencie les machines entre elles en comparant leur capacité de perçage en termes de diamètre et de profondeur, en sachant qu’en fonction du diamètre de travail, la profondeur augmente », précise Pascal Wild, responsable de l’entreprise Alpha Coupe, spécialiste des outils coupants.

Fabrications européennes et asiatiques

A l’instar d’autres fabricants et fournisseurs attachés à privilégier la qualité, ce nouvel entrant sur le marché fait l’éloge des produits fabriqués en Europe qu’il distingue nettement des produits d’import issus d’usines asiatiques. « On ne sait plus trop d’où viennent la majorité des machines aujourd’hui et ce que valent réellement leurs spécificités techniques », commente Pascal Wild. « Hors, la sécurité des utilisateurs est un critère fondamental pour ces matériels. Nos perceuses disposent par exemple d’un système de contrôle de la force d’adhésion du socle magnétique qui assure qu’elles ne risquent pas de se décrocher du support métallique auquel elles sont fixées ». Et Laurent Schwarz de surenchérir. « Il y a sur le marché des produits no-name à très bas prix, achetés à Taiwan, parfois même en Chine, et certains se contentent de mettre leur couleur et leurs logos sur des produits standard, car finalement leurs commandes ne concernent jamais plus d’un millier de machines et leur volume n’est pas assez important pour lancer une fabrication ».
« Bâti en fonte, guide lame en cuivre », Jean-Philippe Davy, de Keni, ne jure lui aussi que par la nécessaire qualité des produits. « Depuis juin dernier, nous sommes entrés dans un nouveau partenariat avec une société européenne qui a vingt-cinq ans d’expérience » explique-t-il. « Nous ne voulons pas que l’on nous retourne de machine, car la mise en place d’un SAV trop important n’est du tout pas générateur de marge. Ceux qui font de la machine d’import s’exposent à la nécessité d’acheter ou de négocier un certain nombre de pièces de rechange pour assurer ce service. Pas nous ». Pierre Borelli, de Ruko, vante également les mérites de la fabrication en Allemagne et explique les atouts de sa seconde gamme actuellement élaborée par la société hollandaise Eurobor. « Nous ne nous comparons pas à Fein, pourtant nous nous situons sur un niveau de qualité identique avec des prix inférieurs. Nous misons sur l’innovation technique et il y a quelques années, nous avions révolutionné le marché avec une perceuse à renvoi d’angle d’un encombrement en hauteur de seulement 182 millimètres ». Pour 2013, dans la lignée de Metabo et comme Keni, Ruko promet de mettre sur le marché une machine sans fil qui devrait séduire, pense-t-il, les professionnels de la charpente métallique.

Marché bataillé

Pendant ce temps... Fein affirme sa suprématie avec sa gamme historique de perceuses magnétiques KBM dont les fonctionnalités sont régulièrement améliorées : dès juin, quatre nouvelles machines seront ainsi dotées d’un clavier de commande tactile Videotouch. Mieux, assurant son rôle de leader, le fabricant allemand retravaille aujourd’hui son positionnement pour donner un accès plus large à sa ligne KBM, avec prix marché qui diminuera d’environ 20% sur la nouvelle gamme sortant en juin, tout en tirant le marché du milieu de gamme vers le haut avec ses lignes KBB issues du rachat en 2011 de l’Américain Jancy. Ces machines KBB, d’un coût inférieur de 30 à 35% aux perceuses premium mais placées au-dessus du prix moyen du milieu de gamme, donneront la possibilité aux professionnels d’acquérir des machines d’une technicité garantie Fein mais aux performances légèrement revues à la baisse par rapport aux KBM pour répondre aux exigences de travaux moins intensifs.

Loin de rester dans sa tour d’ivoire, Fein sait évoluer, la preuve, s’il en faut, que le leader incontesté du marché n’a pas l’intention de se laisser bousculer par l’appétit grandissant de concurrents positionnés sur le milieu de gamme, qui selon les estimations des uns et des autres, tiendraient 20% des volumes du marché, pas plus qu’il ne se laisse impressionner par les revendeurs de produits asiatiques dont les parts de marché en volume avoisineraient les 50 %...