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mars 2014

Les lames de scies à ruban pour le métal

Suprématie du bimétal dans la distribution

Les ventes réalisées directement par les fabricants et celles faites par la distribution semblent peser d’un poids à peu près similaire sur le chiffre d’affaires du marché des lames de scies à ruban. Pour le reste, tout ou presque distingue les produits vendus par les fournisseurs directement aux industries pour une utilisation intensive de ceux commercialisés par la distribution à d’autres types d’utilisateurs pour répondre à des besoins ponctuels ou de tronçonnage de pièces en petites séries.

De nombreux critères conditionnent la qualité et la précision de coupe d’une pièce métallique avec une scie à ruban. Outre ceux qui relèvent de la machine elle-même, de ses accessoires (comme les brosses chassant les copeaux en cours de tronçonnage) ou encore du savoir-faire de l’opérateur dans le cas d’une utilisation manuelle, les caractéristiques des consommables utilisés, fluide de coupe et lame, jouent un rôle déterminant.

En ce qui concerne les lames de scies à ruban auxquelles est consacré cet article, on peut scinder le marché en deux grandes catégories de produits, ceux qui sont destinés aux besoins de production en grandes séries des industries (notamment les industries métallurgiques et les aciéries), presque toujours vendus directement par les fabricants, et ceux que la distribution, principalement les fournitures industrielles et les quincailleries, commercialisent à une clientèle de serruriers, chaudronniers et autres métalliers pour satisfaire des besoins ponctuels ou usiner des pièces en petites séries.

Un marché de 25 à 30 Me

La valeur du marché des lames de scies à ruban estimée par les fabricants que nous avons interrogés sur ce point représente un chiffre d’affaires de 25 à 30 Me. Comme nous l’évoquions en préambule, les ventes directes aux entreprises utilisatrices et celles de la distribution ne présentent pas de disparité importante, les estimations sur ce point donnant toutefois l’avantage aux ventes réalisées par les fabricants eux-mêmes qui représenteraient 55 à 60% de la valeur globale du marché, lequel semble marquer le pas notamment à cause de la baisse du secteur de l’automobile, très consommateur d’aciers faiblement alliés.
Bimétal M42, le standard de la distribution

Apparues il y a environ 25 ans, les lames de scies à ruban bimétal sont fabriquées à partir d’un feuillard suffisamment souple pour assurer la rotation du ruban sur les poulies de la machine sur lequel on rapporte par soudure laser un fil métallique HSS qui sera par la suite usiné par fraisage et par meulage pour la fabrication des dents. Convenant à la coupe des métaux dans une très large plage de duretés, les lames en bimétal existent en diverses qualités d’acier rapide dont le M42 (contenant 8% de cobalt) est le plus répandu puisqu’il génère environ les trois quarts des ventes de lames de scies à ruban réalisées par la distribution, laquelle détiendrait 80% des ventes de rubans bimétal. La domination de ce type de ruban sur le marché de la distribution s’explique par le fait qu’il convient aux coupes usuelles réalisées par les artisans sur des machines automatiques et semi-automatiques, soit environ 80% du parc français de scies à ruban.

Très proche du M42, l’acier rapide M45 a subi un traitement thermique un peu différent qui le rend plus adapté à la coupe manuelle des profilés. Pour la coupe avec un ruban bimétal d’alliages difficiles à usiner (inox, aciers alliés chrome et nickel …), les dentures en acier rapide M51 à la teneur renforcée en cobalt sont préconisées.

Lames carbure dans l’industrie

Certaines lames ont des dents meulées et épointées pour laisser la place à une bille de carbure soudée puis affûtée pour procurer une bonne attaque du métal. Ces outils de coupe convenant aux utilisations intensives des industries qui équipent souvent des machines de forte puissance autorisent des vitesses de coupe élevées engendrant ainsi une réduction des temps de coupe et répondent à des exigences de rendements importants, y compris dans le tronçonnage des matières les plus difficiles à usiner comme les alliages au titane, les inconels et autres alliages à base de nickel.

Beaucoup plus performantes que les lames bimétal, ces lames sont vendues à un prix nettement plus élevé, entre 2,5 et 5 fois supérieur selon la largeur du ruban. Leur commercialisation relève de la vente directe aux industries dans au moins 90% des cas, de l’avis concordant de plusieurs acteurs du marché. Les besoins de coupe de pièces métalliques de la plupart des artisans ne nécessitent pas le recours à un tel type de lame. En outre, ces professionnels ne possèdent généralement pas les machines pouvant être équipées de tels rubans dont les largeurs standard sont supérieures à celles des rubans bimétal. Toutefois, on peut relever l’arrivée récente sur le marché de rubans carbure en largeur 27 mm qui permet à la distribution de se positionner sur ce segment, même si c’est de manière encore très marginale, pour répondre aux besoins de plus en plus répandus de coupe d’aciers difficiles à usiner.

Le carbone pour des applications peu exigeantes

Outils de coupe mono-matière dont les dents ont été durcies par induction ou par trempe, les rubans au carbone équipent notamment les scies à ruban verticales, dont le parc se réduit comme peau de chagrin, et les machines de faible puissance. Ces lames qui sont moins endurantes (mais aussi moins chères !) et répondent à des applications moins exigeantes que le bimétal sont toujours utilisées par les artisans dans certaines applications comme la coupe des aciers doux ainsi que celle des matières plastiques et du polystyrène. Elles génèreraient aujourd’hui 2 à 5% du marché des lames de scies à ruban.

Dans l’énumération des différentes catégories de rubans, on peut évoquer l’apparition récente de rubans revêtus de titane destinés à la coupe des fontes et des bronzes. Cette gamme de produits à longue durée de vie et faible échauffement actuellement en phase de développement se situerait, aux dires de plusieurs fabricants, entre le bimétal et le carbure en terme de performances. On peut également citer l’existence de rubans à concrétion diamant et carbone en précisant qu’ils sont destinés à la coupe de matières autres que le métal (entre autres le verre, la céramique ou la pierre pour le diamant, les pneumatiques pour le carbone…).

Des dimensions dictées par les machines

La largeur d’une lame de scie à ruban, mesurée entre le dossier et la pointe de la dent, et sa longueur (circonférence totale) sont déterminées par la machine que l’outil de coupe équipe. En ce qui concerne les rubans vendus par la distribution, les largeurs de 20, 27 et 34 mm sont les plus fréquentes, avec un pic des ventes sur la dimension médiane. Ces largeurs correspondent à des longueurs de rubans généralement comprises entre 2 450 et 3 180 mm et à des épaisseurs de l’ordre de 1 mm (0,9 mm pour une largeur de ruban de 27 mm et 1,1 mm pour une largeur de 34 mm). Les produits de dimensions supérieures relèvent presque toujours de la vente directe.

Les lames dont la largeur est comprise entre 34 et 54 mm sont le plus souvent des bimétal, notamment M51, mais aussi depuis une période récente, des rubans au carbure. Les largeurs supérieures, de 67 à 80 mm, voire plus, concernent uniquement ce dernier type de produits dont la longueur peut alors atteindre plusieurs dizaines de mètres.

Quelles que soient leurs dimensions, les rubans sont soudés à la longueur voulue à partir de rouleaux de plusieurs dizaines de mètres (le plus souvent 40 et 90 m). On peut au passage souligner l’importance de cette soudure, une opération déterminante dans la qualité d’une lame de scie à ruban qui requiert, selon les propos d’un fournisseur du marché, pas moins de treize étapes.

Dentures à pas fixe ou variable

Outre le type de matériaux entrant dans sa composition et ses dimensions, une lame de scie à ruban se caractérise également par la forme de ses dents, lesquelles ont des angles de coupe et de dépouille ainsi que des profondeurs de creux différents pour être adaptés aux diverses applications, et le pas de sa denture qui peut être constant ou variable. Dans le premier cas, les dents sont positionnées le long du ruban avec un écart régulier, le pas variable désignant à l’inverse des dents positionnées avec des écarts irréguliers et avec une alternance de petites et de grandes dents de gorges différentes. La coupe de certains métaux comme l’aluminium nécessite une denture à pas constant mais, dans plus des trois quarts des cas, les lames de scies à ruban ont une denture à pas variable. L’alternance des types de dents sur une telle denture confère au ruban une certaine polyvalence qui le rend apte à couper des pièces de formes et de duretés différentes et diminue le risque de casse des dents lors de la coupe. Le pas variable présente également l’intérêt de réduire les vibrations lors de la coupe, ce qui facilite le sciage des tubes, profilés et pièces en bottes.
Une séquence de denture à pas variable peut comprendre de 0,71 à 24 DPP (dents par pouce ou TPI, teeth per inch), le nombre de dents étant inversement proportionnel à l’épaisseur de la pièce à couper. Le cœur des ventes de la distribution concerne les dentures à pas variable de 6 à 8 DPP, bien adaptées aux besoins les plus courants des métalliers et serruriers, soit la coupe de tubes et cornières d’une épaisseur de 4 à 5 mm et celles de pleins de 15 à 20 mm d’épaisseur.

Réduire le coût à la coupe

Gagner en productivité et, au final, réduire le coût d’une coupe est une attente généralisée des utilisateurs de lames de scies à ruban prise en compte par les fabricants dont les services R&D travaillent à l’amélioration régulière des produits sur les quatre critères principaux déterminant la performance d’un ruban que sont, dans l’ordre, la qualité de la soudure (une soudure bien alignée maintiendra le ruban bien droit dans le défilement sur la machine), la géométrie des dents (elle conditionne notamment la polyvalence d’un ruban qui permettra la coupe de différents types de pièces sans avoir à changer l’outil de coupe), la dureté de celles-ci (elle influe sur leur durée de vie) et enfin, l’endurance du dossier, soumis à dure épreuve dans certaines applications requérant une grande vitesse de rotation du ruban.

Côté gain de temps, certains fabricants ont introduit dans leur offre des rubans pré-rodés évitant à l’utilisateur de réaliser lui-même l’indispensable phase de rodage de ce type d’outil de coupe. Le confort d’utilisation des rubans ainsi que la rapidité et l’agressivité de coupe, lesquels peuvent passer par d’éventuels traitements des lames, sont également des aspects largement pris en compte par les fabricants dans le même objectif d’améliorer les rendements.

Parmi les produits novateurs, il nous semble intéressant de mentionner le lancement récent de rubans à double avoyage, essentiellement destinés à la coupe des IPN, qui favorisent une meilleure pénétration de la lame dans le métal à usiner et allongent la durée de vie de l’outil de coupe.

Un service déterminant

Il n’est pas possible de refermer cet article sur les lames de scies à ruban sans évoquer le service qui figure, avec la qualité intrinsèque de l’outil et un bon rapport qualité/prix, parmi les principales exigences des utilisateurs vis-à-vis de leurs fournisseurs et/ou revendeurs. Dans ce domaine, le service se traduit avant tout par la disponibilité du produit. En effet, dans une famille où un seul type de produit se décline en d’innombrables références si l’on tient compte des dentures et des dimensions possibles, seules les références qui tournent le plus sont stockées par les distributeurs. Pour les autres, le fournisseur devra faire en sorte de les livrer le plus rapidement possible à la longueur voulue, les délais admis pour un produit stratégique de nature à bloquer une production ou un chantier étant très courts. Quant à l’obtention rapide d’un ruban à la longueur voulue, il faut citer l’initiative prise il y a trois ou quatre ans par un fabricant majeur du marché, SNA Europe Bahco, d’installer chez certains de ses revendeurs une machine à souder.

Pour la grande majorité des fabricants travaillant avec la distribution, le service passe également par la formation des équipes de vente des revendeurs et l’accompagnement chez les clients pour l’apport d’un soutien technique.

Dominique Totin

 


Un quatuor en tête des ventes de la distribution

Spécialistes des outils coupants et fabricants de machines de sciage et de consommables se côtoient sur le marché mondial de la lame de scie à ruban dominé par quatre fabricants dont deux, le Japonais Amada et l’Allemand Wikus, également producteurs de machines de sciage, sont essentiellement tournés vers la vente directe de leurs gammes aux industries. Les deux autres marques ‘‘poids lourds’’ du marché mondial sont des spécialistes de l’outil coupant, l’Américain Lenox et la marque paneuropéenne d’origine suédoise Bahco qui développe par ailleurs une large gamme d’outillage. Ces deux marques largement tournées vers la distribution forment avec la marque américaine Starrett et la gamme de fabrication française Ultra, toutes deux réservées à la distribution, le quatuor de tête du marché français des lames de scies à ruban commercialisées par la distribution. Egalement constructeur de machines, Starrett est exclusivement tournée vers la distribution sur les marchés européens où elle est distribuée par l’Espagnol Fegemu. L’entreprise Ultra Nova vient quant à elle tout juste d’entrer dans le giron d’un groupe d’outillage indien et nous saurons rapidement quelle orientation va être donnée à sa gamme. En ce qui concerne les produits destinés à approvisionner le marché français, toutes ces marques fabriquent leurs rubans dans leurs propres sites de fabrication, aux Etats-Unis pour Lenox (le soudage des rubans étant réalisé en France par son distributeur Kopram), dans différentes régions d’Europe pour SNA Europe Bahco, en Ecosse pour Starrett.

Le marché français compte d’autres marques bien implantées dans la distribution. C’est notamment le cas de la marque allemande Eberlé, de la marque américaine Morse, distribuée par Keni, ou encore de la gamme fabriquée en Savoie par RBD Jaguar.